FRENCHMAN

FRENCHMAN

Petit récit d'un adhérent d'Espace et Course sur un Triathlon format IRONMAN



Comme prévu voici mon récit sur mon Triathlon format IronMan ou XXL.
Bonne lecture !



En général lors de mes derniers compte-rendu, l'écriture du récit dure aussi longtemps que l'épreuve, mais aujourd'hui je ne pense pas écrire 14h38 !!
Car une partie du récit a déjà commencé de s'écrire dans ma tête durant l'épreuve. Il faut dire que j'avais que ça à faire pour m'occuper l'esprit.

L'idée d'un triathlon XXL a commencé de germer l'année dernière après mes 2 demi Iron 2016.
Il reste quand même la barrière de la natation, avec mes problèmes de crampes. Un midi avec le PullBuoy, je tente de faire 3800m en piscine. Je sors de l'eau fatigué mais ça tient. Avec 6 mois d'entrainements et les formidables encouragements de notre prof de piscine "Tu nages comme une enclume", "C'est quoi cette brasse Grand Mère", "Pourquoi tu fais des nœuds avec tes mains quand tu nages...", je devrais rattraper ce qui me manque. Oui vous avez remarqué la finesse relationnelle de notre prof !

 Après il me fallait choisir l'épreuve. Pour un premier Iron, j'exclus déjà les Montagnards à plus de 4000 de dénivelé en vélo. Ensuite j'exclus les 2 Iron pour des questions tarifaires. Bye bye Vichy et Nice.
Restait donc Le Nord (Ch'triMan) ou Bordeaux (à Hourtin pour être précis) Le Frenchman.

Le hasard a voulu que l'été dernier j'ai nagé dans le lac d'Hourtin pour préparer le NatureMan. Ce sera donc "Frenchman" le gagnant.

Je franchis le cap et m'inscris début Décembre, peu de temps avant l'augmentation du tarif. C'est là que tout se gâte. Les deux semaines suivantes, je ressens une douleur au quadriceps.

Après une coupure de 10 jours non concluante, je file chez le médecin qui me dit "ON dirait une déchirure, 15jrs d'arrêt avec Kiné", sauf la piscine où je peux crawler (je ne sais pas si le verbe existe mais tout le monde aura compris, enfin j'espère).
Mi-Janvier, déjà un mois de perdu sur le plan. Ce n'est pas grave, le temps était pourri de toute façon.
Ma kiné qui pensait traiter une déchirure, s'aperçoit que ça ne correspond pas. En fait c'est un problème de nerf sciatique. Je pense alors que cela me permettra de reprendre vu que ce n'est pas musculaire, mais au contraire, c'est plus long !
Seule la natation reste autorisée.
A partir de début Février, je suis enfin autorisé à refaire du HomeTrainer, sans résistance. Je m'enferme donc plusieurs heures dans mon garage sur mon vieux vélo pour mouliner, encore et encore !

Mi-Mars je commence mes sorties longues en Vélo, je suis large, il me reste 3 mois !!
Et dans l'euphorie comme la course à pied commence à revenir, et que le plat ça me saoule je décide d'aller faire une sortie un mercredi soir avec mon club de Monistrol. Car beaucoup de mes amis coureurs me manquent. Même si en général je les fatigue car je parle trop, ça leur fait donc des vacances. Les 12 km se passent bien, mais le lendemain matin, la sciatique se rappelle à mon bon souvenir.

Ma kiné me fait comprendre qu'il faut rester patient. Donc je relève le pied 10 jours sur les footing mais je continue vélo (je passe les 110 puis les 120 km) et natation (premier 3800 avec Pullbuoy, sans s'arrêter en 1h42).
Fin Mars, je peux faire 2 fois une heure le long de la mer du Nord, sans douleur. Je sens que c'est bon, il me reste encore 12 semaines, je suis large.
Premier Dimanche d'Avril  sortie Monistrolienne. 21 km où tout se passe bien jusqu'au dernier pré que l'on traverse. Mauvais appui sur une motte d'herbe et j'ai la cheville droite qui vrille. Avec la chaleur j'arriverais au bout mais le lendemain matin toute la jambe droite est douloureuse.

Décidemment, quand ça veut pas, ça veut pas !

Rebelote, on arrête la course à pied une semaine. Ma kiné me demande si je veux vraiment le faire ce triathlon. Après une reprise positive, j'attaque une grosse semaine, 3800 natation (avec peu de pullbuoy), le vendredi matin (j'ai pris ma matinée) j'avoisine les 140 en vélo et le lendemain je pars courir vers chez moi. Après 10km je discute avec deux amies que je croise sur les chemins (plats cette fois-ci), je repars et 2km plus tard grosse piquée à la base du mollet.
J'essaye de continuer mais Niet, je dois rentrer.

Je m'arrête 5 jours, je refais une heure de vélo à Méons, sans forcer, je ne sens quasiment plus, dans ma tête je pense que c'est OK. Le lendemain footing à Méons.  Et je n'ai même pas fini l'allée centrale, qu'une nouvelle piqure arrive dans le mollet, je rentre faire un peu de gainage sur l'herbe.
Le lendemain matin, verdict du médecin, c'est une déchirure, petite certes, mais il faut tout arrêter (sauf la natation avec PullBuoy). J'appelle ma kiné pour un autre avis, mais malheureusement, il n'y a rien à faire. Il faut attendre que ça cicatrise sinon ça sera pire "On jugera à la palpation dans 2 semaines". 

Je suis à 5 semaines de mon triathlon, la préparation est loin d'être réussie et je dois tout stopper.
Le moral en prend un sacré coup. Plusieurs d'entre vous me soutiendront et me boosterons pour que je reste confiant, et je vous en remercie.
Il ne me reste plus que la piscine Raymond Sommet pour garder un peu de souffle. Le soir un peu de muscu pour maintenir les cuisses et l'espoir.
D'ailleurs un jour en sortant, je croise Yazid Achour, mon ancien prof de Karaté (un très gros palmarès dans ce sport). On discute un peu et pour lui ça ne l'étonne pas. Passer quarante ans on a tendance à délaisser, la partie récup et la partie étirement, très grosse erreur !
Il me donne une appli pour travailler les étirements et me dit de garder le moral. C'est tout bête mais venant d'un sportif international comme lui, cela me permet de laisser vivre la petite flamme d'espoir qui vacillait sur la dernière bougie de la motivation.

J-18, je revois ma kiné. Comme elle connait mon échéance, elle est franche, "il faut savoir écouter son corps. Il faut oublier tout idée de temps et se dire que ce n'est peut-être pas encore la bonne année. Il faut s'en servir comme une expérience, mais ne pas insister. J'ai perdu pas mal de tonicité au niveau des mollets. Ils ont fondu.
A la première douleur, il te faut arrêter. Si la cicatrisation ne tient pas et que la déchirure repart, ce ne sera pas 3 semaines d'arrêt complet mais 3 mois." Adieu l'étape du Tour, Adieu Paladru ....

Pendant quelques jours "Grosse tempête sous un crâne". C'est la première épreuve où je vais commencer en sachant que je ne terminerais pas. Pour augmenter la cicatrisation, je redémarre juste du hometrainer sans résistance, je ne cours pas. Il n'y a pas que les mollets qui ont fondu. Ma tolérance à la selle aussi !

J-11. Je sors du garage et je repars faire le hamster à Méons. Je ferais mes 50 tours (avec un peu de vent) histoire de travailler le mental. 50 km avec vent de face à la fin de la remontée sous le pont et sur la ligne droite des peupliers.

J-8. Je suis en Allemagne pour soutenir ma fille et son équipe au Championnat d'Europe de HipHop (où a fille termine avec son équipe J ). C'est l'endroit où je rechausse mes baskets. Nous partons à 4 et en discutant , je ne vois pas passer le temps et au bout d'une heure nous rentrons, à peine plus de 8km, mais le mollet a tenu.
Le lendemain, quelques courbatures pour me rappeler que ma préparation n'est pas optimale.

Tout juste le temps de rentrer de Kalkar, de faire une petite sortie vélo pour vérifier la mécanique (frein, position sur les prolongateurs, vitesses ...), un plouf dans la piscine pour se rappeler comment on nage, et il est temps de préparer les valises pour Hourtin.

Et oui, la course n'a pas encore démarré.

Quand on vous dit que c'est long un Iron ;-) !!



Au moment de partir ma Flo me demande de ne pas aller au-delà de mes limites et de ne pas finir aux postes de secours comme elle m'y a déjà vu.

Ma sœur m'accompagnera dans mon périple qui démarre le Jeudi Matin. J'ai revu trois fois mes valises. Les sacs de transition sont prêts. Comme les sacs sont séparés, j'ai tout doublé. Les pastilles de magnésium, les crèmes anti-frottements, les sparadraps pour ampoules ...

Une inquiétude arrive en plus des autres : la chaleur. Ils annoncent 35 le Vendredi, et un léger rafraichissement à 26 le samedi, jour de la course. Et franchement par expérience que courir au-dessus de 23/24 reste pour moi difficile.

La route se passe sans encombre. J'ai juste oublié mon gâteau de semoule dans le frigo, on s'arrête donc au A----N de Bordeaux (désolé je ne peux écrire le nom complet au boulot) pour que je puisse en refaire un le soir au Camping.
Nous arrivons à Hourtin à 18h40. Génial je vais pouvoir récupérer mon dossard, plutôt que Vendredi.
Sur le parking quelques cyclistes sont déjà à l'échauffement, casque aéro sur la tête. Ils sont quatre, tous en forme de V, bizarre.

Dans la file d'attente, j'attrape mon portefeuille, j'en sors ma licence (dont j'avais bien vérifié la présence avant de partir), et là gros stress !!
En retournant ma licence je vois écris 2016 !
Je regarde la date d'expiration 31/12/2016. Depuis des semaines je me promène avec la mauvaise licence. J'ai toujours vérifié sa présence, mais jamais sa date.
Là je suis pris de grosses suées. Je fouille mes papiers je n'ai pas l'autre.
J'essaye de me connecter à l'appli de la FFTRI, ça ne passe pas.
Je commence à ressentir quelques tremblements. Toutes ces galères pour s'arrêter sur un pb de licence.

J'ai vraiment l'impression d'avoir un petit démon sur mon épaule qui a décidé de me saborder mon Tri.
C'est mon tour.
Je donne mon nom et mon numéro et je tends ma licence avec ma carte d'identité (qui masque le 2016, pour ne pas trop attirer l'attention). Pendant qu'elle me cherche dans la liste son téléphone sonne.
Ça c'est l'ange qui est sur mon autre épaule qui vient de se réveiller.
Elle décroche tout en jetant un oeil sur ma carte d'identité. Il correspond à la licence. Elle commence de lire le numéro de licence de 15 caractères. Mais comme le début correspond et qu'elle aussi concentré sur sa conversation, le téléphone sur l'épaule et une main sur le listing de l'autre elle me tend le stylo pour que je signe.

Je signe et replis rapidement mes papiers, sans faire de zèle. Plus tard dans la soirée j'arriverais par télécharger la bonne licence par acquis de conscience. Car oui je suis en règle !

Une fois qu'elle a raccroché, elle récupère puis me donne mon enveloppe et mon sac (avec Puce, bracelet, sacs de Ravito, autocollants ...).

Entre le coup de chaud et la chaleur dans le hall derrière les vitres, je ressors en nage.

A peine arrivée au camping, j'attaque mon gâteau de semoule, aux raisins, abricots secs et pépites de chocolat (il reste prioritaire sur le gâteau à la crème de marron de Sandrine :-)).
Pendant qu'il refroidit je remplis les sacs de transition en les revérifiant scrupuleusement.
Cette fois-ci en plus des transitions, il y a des sacs de ravito perso. Comme il n'y a droit à aucune assistance, je charge un peu le sac vélo (une 2e chambre à air, crème solaire - il en faudra- pastilles, anti-frottement ...).
Et pour terminer je prépare mes croque-monsieur. 2 Croques-monsieur (1 par boucle sur les 120 premiers km) avec un peu de protéines, 1 Croque marron (pour le dernier tour de 60) avec plus de sucres.
Les bidons seront remplis le samedi matin au dernier moment.

Vendredi matin, pas de réveil, c'est la dernière nuit où je peux "a peu près" dormir. Car soyons honnête le pression augmente (et pas seulement la pression atmosphérique).
Petit tour dans Hourtin Bourg pour 2, 3 courses dans le SPAR du centre, puis nous allons repérer une partie du parcours vélo la première ligne droite (17 km de long) !!!
C'est interminable. Avec la chaleur la route brille au loin.

En fait il faut savoir que ce triathlon a dû être tracé, par un architecte qui ne connaissait ni le compas ni le rapporteur ! Uniquement la règle.

La natation, est une ligne droite de 3800m (dans les faits avec l'entrée dans le port il doit y avoir 3400m tout droit et le reste dans le port).

Le vélo, c'est 3 boucles de 60km découpés en 4 lignes droites (avec plus ou moins d'aller/retour par ligne).

La course à pied 4 boucles de 10,6 km, composés de 5 lignes droites en A/R et une boucle sur l'île aux enfants (c'est quand l'architecte a perdu sa règle). Et oui, petit côté nostalgique, les aires de transition sont sur l'île aux enfants. Mais je n'ai croisé ni Hyppolite, ni Casimir, sinon je vous aurais ramené un autographe.

La route parait étonnement plate, ce n'est que sur le vélo que je vais sentir quand le faux plat monte ou descend.
Malgré la chaleur, nous croisons plusieurs groupes de cyclistes (une bonne trentaine). Pour me rassurer, sans me convaincre non plus, je me dis que ce sont des coureurs qui sont encore plus à la ramasse que moi niveau préparation, et ils misent tout sur la sortie de la veille.


Retour au camping, repas, sieste éveillée (impossible de fermer l'œil).

16h30, avec ma sœur nous amenons les sacs et le vélo au parc à vélo. Comme ils annoncent de la pluie je protège les sacoches et les mousses du repose bras avec du film plastique, pour ne pas avoir trop de signes distinctifs. Mais en arrivant je vois que certains vélos sont carrément sous bâche.
Ecriture du numéro au marqueur sur bras et cuisse avant d'aller poser le vélo, et je dépose ma monture avec un petit pincement au cœur. J'espère le revoir bientôt, c'est que je serais sorti de l'eau.
Le parc est déjà rempli à plus de 80%.
Je pose mes sacs sur les râteliers prévus à cet effet, et je file au 2e Briefing.
Le temps que tout le monde se mette en place j'écoute un peu les conversations.
"Cette année je suis en peu mieux préparer, j'en suis à 4000 km en vélo".
"Moi c'était plus juste, mais on est venu repérer une semaine on avait 600 km dans le coin"
"Et Gilles ?"
"IL connait par cœur il est resté nagé..."

Et là la fameuse question arrive déjà (et elle reviendra plusieurs fois) "Qu'est-ce que je fais là" !!

L'animateur et l'organisateur lancent la présentation. Pour situer le second personnage "Benji", le premier nous en dresse un rapide portrait. Ancien international de Natation, et triathlète émérite, il a fait plusieurs fois "Kona" (Le St graal de des triathlètes sur IronMan à Hawaï - au dessus de 10h de courses vous ne serez jamais qualifié), et il est le seul français a être sortie 1er de l'eau à Kona.
Certains demandent si la natation fait bien 3800 et pas plus. Benji confirme, son "poulain" l'année dernière est sortie en 51mn ce qui est normal pour 3800, et lui-même l'a fait "à fond" (sans rien enchainé) et il le tourne en 44mn ce qui aussi normal. Et il croit bon de préciser, "je ne suis pas capable de faire plus de 4000 en 44mn. Enfin ca fera 3800, si vous allez tout droit" !
Pour aller tout droit c'est très simple. "2 bouées rouges au début qui délimite l'entrée dans la ligne droite, 2 au bout, une bouée jaune tous les 200m que vous devez garder sur votre gauche. Ensuite vous remontez le chenal pour la navigation des bateaux, et après vous tirez au plus court jusqu'à la sortie."
C'est vrai que vu comme ça, c'est enfantin.
En plus L'eau est annoncé à 21° donc les combis sont autorisées, il manquait plus qu'elles soient interdites !!

Il fait un gros focus sur les consignes de sécurité sur la partie vélo. Car les routes seront ouvertes, il y a une traversée de zones et 3 demi-tours dont 2 en plein milieu de la route.

Quelques brins d'humour sur le moral qui va baisser "Quand vous aurez posé le vélo et que vous vous demanderez j'y vais ou j'ay vais pas. Moi je vous réponds tout de suite allez-y. Vous aurez bien le temps de nous plaindre après." Ou sur les ravitos, "j'ai prévu de tout sur les ravitos, même en course à pied je vous ai mis des gels. Bon je sais que seuls ceux en dessous de 9h vont en vouloir les autres vous ne pourrez plus l'avaler".
Et je confirme une chose, même à mon dernier tour de course à pied, il restait des sticks de saucissons, du raisin, de l'orange...

Le briefing s'achève après une séance de Questions/Réponses. Puis en sortant je passe vers "Benji" pour une question que j'ai fait semblant d'oublier pour ne pas la poser devant tout le monde "Et la frontale, il en faut une ?".
Il sourit. Pas de soucis elles sont prévues, au cas où, mais la fin du parcours sera éclairée.
Car la fin du parcours ne se fera pas sur l'île aux enfants mais sur le port "pour l'ambiance". Et pour ce faire, on passera 500m par une ile sablonneuse : l'île aux bananes.

Pour ceux qui ne le sauraient pas, sachez que la banane est le principale composant du .......... "Gloubiboulga" !! C'est bon tout le monde a connecté :-) !

Je quitte la salle et rejoins ma sœur qui était allée se promenée vers le village. Petit repas léger.
Je termine ma 3e bouteille d'eau , avec minéraux en 2 jours. Un peu de gâteau de semoule et au lit jusqu'au réveil 4h15.

4h15, le réveil sonne, et mon premier réflexe, et de faire reporter de 10 mn. Mais mon ange s'est réveillé aussi et il me secoue.
Je déjeune un peu, mais les intestins sont bien noués. Plusieurs A/R au WC n'y changeront pas grand-chose. SI ce n'est que de nager un peu plus léger !
Départ une heure plus tard, mais à cette heure-là il n'y a pas grand monde et en moins de 5mn nous sommes sur place.
Le parc à vélo est en plein ébullition, entre les athlètes qui font les allers-retours, les spectateurs massés autour des barrières et les bénévoles. Un vrai petit village Gaulois.
Je dépose mes ravitos perso dans les caddies prévus, puis mon casque et mes bidons sur le vélo.
Et là je m'aperçois que tout le monde regonfle.
Bizarre j'ai gonflé hier ils ne sont pas prévoyant !
Mais le doute s'installe, car ils sont vraiment tous en train de gonfler, sauf moi.
Pris de remords, vu que j'ai le temps, et sur les conseils de ma sœur qui voit que cela me turlupine, je retourne à la voiture chercher ma pompe à pied. Et bien m'en a pris, mes pneus étaient à 4 bars, alors que je gonfle à 7. A priori la chaleur de la veille n'y est pas pour rien.
Je regonfle à 7 et je quitte le parc serein.

Pas comme le concurrent qui arrive à l'arrache en vélo les sacs de transition sur l'épaule. Le parc ferme dans 10mn.

Comme la natation est une ligne droite, vous aurez tous compris que le départ est différent de l'arrivée.

A partir de 5h50 les concurrents se rapprochent du centre du port où 10 bus vont nous emmenez jusqu'à "Piqueyrot" de l'autre côté du Lac. Dans la majorité des cas, nous avons notre combi néoprène dans un sac, mais ont déjà enfilé les jambes.
Tout le monde embarque et à 6h15, la caravane des cars démarrent.
Vu le temps qu'il me reste avec un retour vers 8h30/8h45, j'ai conseillé à ma sœur de se recoucher !

Dans le car il n'y a plus grand bruit, l'agitation du parc à vélo a laissé sa place à la concentration ou à l'appréhension, selon.
Le soleil commence de poindre et entre 2 forêts de pins de grands pré sont noyé dans la brume après les orages de la nuit. Pour palier la fraicheur (toute relative) et me porter bonheur je suis parti avec mon coupe-vent du NatureMan.

Nous arrivons à Piqueyrot. Les portes des cars s'ouvrent, et là personne ne part sur la plage. Tout le monde file dans les bois. Plus ou moins loin selon le niveau de concentration ou d'appréhension.

Pour l'enfilage de la combinaison je résume, sinon il y en a pour un quart d'heure.
Sporténine, crème anti-frottement, enfilage, bonnet, demande d'un coup de main pour zipper et me voila prêt. Dépose des sacs, et direction la plage. Comme il y a peu de fond il faut aller très loin pour s'immerger, donc nous sommes nombreux à nous coucher dans l'eau. Mais déjà l'organisation demande à remonter sur la plage pour les photos et pour faire monter la pression avant le décompte.
Le soleil se lève sur le lac, plein Est.
Notre ligne droite est orientée SO->NE nous avons donc le soleil sur la gauche, heureusement que je respire à droite !
Pendant que le DJ se lâche je réajuste la combi.
Puis nous entendons la corne de brume, c'est le départ.
Nous marchons longtemps avant que le niveau soi suffisant pour nager, plus d'une minute.
Je commence de nager et ma lunette droite se remplit en 10 secondes. Je me redresse, je suis encore sur la pointe des pieds. Je réajuste, je repars et 20sec plus tard, juste entre les 2 bouées rouge du départ, rebelote.
Sauf que là il n'y a plus de fond pour se redresser. Et essayer de se tenir à la verticale avec une combi qui flotte, c'est galère.
Mon diablotin est en forme (quoi qu'à ce moment-là il portait un autre nom, mais la décence m'interdit de le prononcer).
Il me faudra encore 2 ou 3 tentatives avant de faire l'étanchéité.


Bien évidemment à ce train-là je suis bon dernier. Je ne m'excite pas. J'essaye de prendre un rythme régulier pour ne pas favoriser les crampes et j'essaye de m'appliquer pour bien glisser. Après quelques minutes comme j'ai beaucoup de mal à m'orienter je regarde à gauche, je vois une bouée jaune à 150m. Là je sens que j'ai un peu dévier. Je sais que j'ai toujours tendance à partir à tribord.

Car même si l'organisation est bien faite, elle n'a pas prévue de baliser le fond de l'eau.

Comme je ne peux pas tout le temps tourner la tête à gauche, j'essaye de trouver un point loin devant, comme me l'a conseillé David. Et je repère un bateau au loin qui m'a l'air stable. Je le garde en ligne de mire et je nage.
Je me refuse à regarder ma montre pour ne pas voir que je nage seulement depuis 10 ou 15 mn.
Je nage. Je revois le fond nettement, en marron clair. Je vise toujours le bateau.
Quand j'arrive vers lui, le marin me dit "Attention à la chaine de l'ancre" !
Le bateau ne fait pas parti de l'organisation. C'est un plaisancier qui a jeté l'ancre.
Je contourne son bateau et je vois je ne me suis toujours pas rapproché des bouées jaunes. Alors je change de philosophie. Je me force à nager toujours sur bâbord, ce qui devrait s'équilibrer avec mon penchant tribord.

Et cela semble efficace, car je finis par rejoindre d'autres nageurs, dont un qui brasse ! Et je vois mes premiers bonnets blancs sur la droite. Je cherche alors un autre point de mire et je vois un bateau pneumatique qui doit faire partie de l'organisation. Et je prends mon mal en patience, je nage.

Jusqu'à présent, mes tris étaient suivis par des canoës qui laissent peu de vagues sur l'eau. Ici il n'y a que des bateaux et le sillage des bateaux est beaucoup plus impactant. C'est ainsi qu'à quelques moments je nage en eau d'une vague, juste au moment de respirer ou de plonger le bras.
Résultat, soit je bois la tasse, soit mon bras plonge dans l'air. Efficacité zéro.
Au bout d'un moment, j'arrive à prendre le rythme des vagues et quand je la sens arrivé je me laisse porter.
De temps à autre je vois tellement bien le fond que j'ai l'impression que je pourrais en faire une partie en marchant.

Je continue de croiser d'autres nageurs. C'est réconfortant. Et doucement je me rapproche des bouées jaunes.
Mais tellement qu'à un moment je passe de l'autre côté durant 10s. Je me recale et je repars. Je n'ai pas de douleurs mais je commence de trouver le temps long.

Puis arrive la première crampe. Pour ne pas la laisser s'installer je brasse tout de suite (j'avais testé en piscine). Elle passe rapidement.
Je n'ose toujours pas regarder ma montre. Mais en général la première crampe c'est au bout d'une heure. Il y a des risques d'en avoir une autre dans les 10 mn.

AU loin je commence à apercevoir l'autre rive avec l'entrée du port. Je m’applique. Pour l'instant pas de fatigues. Et rapidement les 2 bouées rouges sont en vue.
Déjà , génial !!
Dans ma tête, bouée rouge = un coupe à gauche ou coup à droite 100m et on sort.
Mais non.

EN fait après les bouées rouges, il y a des petits flotteurs rouges qui montrent l'entrée du chenal. Sur le coup je me suis un peu précipité dans l'euphorie et une crampe commence de poindre (l'autre jambe, pas de jaloux). je ralentis et me force à respirer lentement.

Je longe la jetée un moment puis on doit partir à gauche, sauf qu'en pivotant, on se retrouve pile en face du soleil. Et durant les dix dernières minutes, je vais un peu galérer plus pour m'orienter que pour avancer.

Nous passons sous le petit pont que l'on franchira juste avant l'arrivée (entre l'ile aux bananes et le port), et je vois l'arche de sortie de l'eau. 200m 100m, 25 j'essaye de me redresser, trop tôt, j'effleure à peine le fond vaseux. Encore trois coups de bras et je sors.
1h33.

J'ai un peu de mal à aller droit, mais je suis très content. Ca c'est plutôt bien passé, et je ne suis pas dernier.

J'arrive dans la tente de transition, je me dirige vers mon sac (il n'y en plus beaucoup, c'est plus vite trouvé), et j'entends de nombreux coup de sifflet dans la tente.
Sans doute une coutume locale :-)
Sauf que je ne vais pas tarder à la connaitre, et qu'elle n'est pas très locale.
J'enlève la combinaison, tant bien que mal. J'attrape ma grande serviette de bain, je me sèche un peu.
Comme le voyage est encore long, j'ai préféré opté pour un vrai cuissard vélo et pas une tri fonction ou la mousse est plus fine.
Donc j'ai nagé en maillot de bain.
Je m'enroule dans ma serviette, enlève le maillot. J'essaye d'attraper le cuissard qui se coince.
Je tire ma deuxième main lâche la serviette.
Celle-ci tombe
et l'arbitre Siffle !
En une fraction de seconde, je lâche mon cuissard, remonte ma serviette et me retourner face à l'arbitre qui tel un tribun m'acène : "Nudité interdite, ça normalement c'est carton rouge, et disqualification immédiate !"
"Dépêchez-vous d'aller derrière le paravent".
Tout penaud j'embarque mes affaires sous le bras et file derrière le paravent.
Décidément le mec en rouge avec la fourche sur mon épaule n’a toujours pas décidé de prendre des congés.

A posteriori, vu le délai entre la chute de la serviette et le coup de sifflet, l'arbitre avait dû me repérer, et il devait déjà avoir le sifflet à la bouche, avec un petit sourire en coin.

L'avantage c'est que le message est bien passé !
Il en profite pour continuer son petit jeu, car j'entends plusieurs coups de sifflet de derrière le paravent.

Chose bizarre, je vois deux ou trois nageurs, sans combi. Dont un carrément avec un petit maillot de bain, même pas en tri-fonction.

Je finis de me changer correctement : cardio, bretelles, maillot, booster, crème, chaussettes et chaussure. Dans l'ordre s'il vous plait.
Puis direction le parc. En passant petit tour aux toilettes.
Je trottine jusqu'à mon vélo, il y a quand même du monde qui regarde. C'est l'un des 4 ou 5 qui reste au bout de mon allée.
J'enlève les protections de pluie, je remets mon compteur et j'enfourche, après la ligne bleue, oui Monsieur l'arbitre.

Résultat : avec toutes ces péripéties j'explose mon temps de transition, mais dans le mauvais sens.
Peu importe, pour économiser la batterie, j'avais décidé de ne pas chronométrer mes transitions.

Le départ en vélo se fait sous les applaudissements du public. On sort de l'ile aux enfants, on se dirige vers le rond-point au centre du port et on part à gauche, direction... ??

Eh bien tout droit (c'était quand même pas difficile) !

A une ou deux chicanes près c'est parti pour au moins 17km, tête baissée (voire 180 pour les premiers). A la sortie du rond-point j'entends ma sœur qui m'encourage, je ne l'avais pas vu dans la foule. "Allez Jé !"
J'entends le speaker qui annonce que la tête de course a déjà près de 30km d'avance, et tient une moyenne de 40 !

Je pause les avant-bras sur les coussinets, je rentre les coudes pour faire semblant d'être aérodynamique et je mouline. J'ai toujours en-tête la course à pied ou le mollet peut lâcher. Pour ne pas trop le solliciter, j'ai décidé de ne pas trop monter dans les tours afin de limiter l'acide lactique qui pourrait attaquer mes petites fibres, surtout avec l'autre pervers sur mon épaule.
Je me suis fixé la limite à 150 pulsations. La seule exception sera en cas de dépassement vu que cela ne doit pas excéder 30 secondes.
Il est à peine 9h du matin et la météo est au top pour rouler. Sur cette première ligne droite, jusqu'au bourg il y déjà un public nombreux qui nous encourage. Après le bourg on sort de la ville, et là la densité en population diminue mais celle en pin augmente.
Même si ce n'est ps pour très longtemps, car une grande partie de la pinède a été brulé par un grand incendie le mois précédent.
Dans ce sens le faux plat est montant le cardio reste stable et la vitesse oscille entre 27 et 30 km/h selon la pente. Les sensations sont bonnes, maintenant il n'y a plus qu'à.
Au départ avec une telle ligne droite, difficile de se donner des petits jalons. Donc on va se contenter d'aller jusqu'au panneau des 10km. Après celui-ci il y a 3 ou 4 km seuls puis on croise les autres vélos durant les 4 derniers km de la ligne droite.
Le temps que tout le monde prenne son rythme le trajet est assez vivant, je double on me double. Et cela va m'occuper quasi jusqu'à la fin de la ligne droite.

Donc, 4 kilomètres avant la fin de celle-ci, nous avons une partie en commun avec ceux qui sont sur le retour. Et là la file indienne de cyclistes qui défile en sens inverse est impressionnante. Déjà de mon côté elle était longue mais en face la densité est encore plus importante.
Les premiers que je croise, avant qu'ils ne tournent à droite, on presque 8km d'avance sur moi. Je remonte la file et je croise un coureur handicapé. Il a sa jambe gauche tenue dans une coque noire, sans doute en carbone, et il pédale avec une seule jambe. Je le croiserais plus sur le vélo, sa vitesse étant supérieure à la mienne.
Je ne le reverrais que durant les tours de CAP dans un fauteuil à trois roues. Je pense même qu'au vu de la tenue bleue, il était de l'équipe de France.
D'ailleurs je devrais dire ils au pluriel, car sur la CAP je croiserais 2 fauteuils.

Messieurs Chapeau !!

Toujours en remontant la file, je vois de loin un groupe de coureurs. Je ne comprends pas vu la célérité des arbitres à agir. Mais en fait eux ont une dérogation. Ils accompagnent une personne qui tracte son fils handicapé dans une sorte de carriole rouge profilée. Bien qu'ils n'aient que 5 ou 6 km d'avance, je ne les rattraperais qu'au 160e km de vélo.
Mais ils arriveront plus d'une heure avant moi au final !

J'arrive au bout, demi-tour après les trois petits cônes et on repart dans l'autre sens.
Panneau des 20km.

La sensation, confirmée par le compteur, est sans appel : le faux plat est descendant, la vitesse oscille entre 30 et 34 km/h.
Mais au bout de 4 km, on vire à droite devant un ravito pour une nouvelle ligne droite de 9km. A 4 km au croisement (pas pour nous, c'est pour les autres, nous nous allons toujours tout droit) il y a 2 bénévoles et ma sœur, au moins je suis sûr de ne pas la louper.
Puis juste après le croisement le revêtement de la route devient infernal.
Durant 5 km, c'est le marteau piqueur. Le retour a un revêtement plus roulant est une vraie délivrance.
C'est à ce moment-là que l'on tourne à gauche 90° pour une nouvelle ligne de 7 à 8 km. Ces deux lignes droites ont l'avantage d'être vraiment plate et protéger du vent. Car le feu ne s'est pas propagé jusque-là et les pinèdes sont intactes.

J'approche du 38e km  qui contient le ravito perso et avec ma première récompense, mon premier croque-monsieur.
Durant 1 km, on serpente dans un lotissement pour aller attraper la dernière ligne droite. J'en profite pour manger tranquillement.
La nouvelle ligne droite fait pratiquement 10km. Etant plus longue elle me permet de voir plus de cyclistes.

Je retrouve un faux plat plutôt descendant, c'est très agréable. J'arrive ainsi au bout. Petit demi-tour sur la route. Effectivement le faux plat est montant.
4/5 km après mon demi-tour je repère un vélo avec roue lenticulaire, casque aéro très concentré.
Soit il a eu un gros soucis mécanique soit c'est le premier qui arrive.

Peu après je vois une deuxième puis une troisième roue lenticulaire, et là je n'ai plus de doutes, les premiers sont sur nos talons. J'essaye de rester concentré pour arriver à faire au moins une boucle avant de faire croquer par PacMan !

Au bout de la ligne droite, traversée du bourg et on retrouve la méga ligne droite, pour deux derniers kilomètres qui m'amènent au rond-point du départ.
60km 2h04 !!
Et c'est reparti pour un tour. Et oui plus que 2 !! Deux c'est pas beaucoup !

Je repars sur ma ligne et je roule en attendant le premier. Quelques kilomètres après la sortie du bourg, sur le bas côté, j'aperçois un vélo BMC, seul. En fait le propriétaire est cachée derrière un poteau de maisons 3 ou 4 mètres avant, en train de...
...

téléphoner !! "Hey What did you expect ?"

Et là vous croyez qu'il y aurait un arbitre avec son sifflet ? Parce que s'il y a un truc que j'ai retenu, c'est qu'il n'y a pas d'assistance et que les mp3, GoPro ou tout autre appareil électronique (à part les montres et les compteurs bien sur) sont interdits. C'est pas bien Monsieur !!

Baste. Moi j'attends toujours mon premier.

Durant l'attente, j'en vois un qui ne terminera pas. IL revient à pied, en poussant le vélo et en tenant ses chaussures à la main. A priori, pépin mécanique.

Et peu après le panneau des 10 (donc du 70km) je vois la moto de tête me dépasser suivi du premier qui me double au moment à je dépasse une "Christine". Je m'en suis rappelé car c'était au moment où le premier passe et surtout car à la fin elle me prendra presque un tour en CAP, Bravo Christine, une régularité exemplaire !!

Alors pour vous décrire le passage du premier, on pourrait dire que c'est fantomatique. Il ne fait pas de bruit il passe comme une plume. Juste le bruissement de l'air de la roue.
Aucun geste parasite.

Il aurait pu faire dans la dernière vignette d'un Lucky Luke, quand il s'en va tranquillement. Mais avec un Jolly Jumper avec 2 roues, et un casque aéro à la place du chapeau.
Au moment où il me dépasse je n'ai pas l'impression qu'il me met une mine. Pourtant une minute plus tard je ne le vois déjà plus à l'horizon.

Le second arrivera trois kilomètres plus tard, puis les cadors vont s'enchainer.
Entre temps, le soleil a lui aussi continué sa course dans le ciel. Il est bientôt midi et la fraicheur disparait.
Au 72e km j'attrape une bouteille d'eau (d'un concurrent CA..UR) et commence de m'asperger un peu.
Sur la fin de ma ligne droite, le vent commence de se lever. Heureusement la fin du faux plat montant est proche.

Demi-tour vent dans le dos, bonheur sur 4 km. Puis on retourne dans nos pinèdes, où le vent nous laisse tranquille, puis sur mon marteau piqueur. Les 3h de vélo sont passé et je commence à rechercher une autre position sur la selle. Je me dis que si déjà j'en ai marre ca va être galère. Je sens quelques échauffements, mais heureusement j'arrive au ravito perso.
Et cette fois double récompense !!
Le croque-monsieur
et La crème anti-frottement. L'effet est très apaisant.

Reprise de la ligne droite de 10. Ce faux plat descendant passe très bien car en plus le vent est plutôt dans le dos. Par contre dès que je retourne le vélo, c'est tout de suite moins sympa.
Vente contraire faux plat, la moyenne chute j'oscille entre 25 et 28 km/h. A ce moment-là, je me dis que mes 50 tours de Méons n'ont pas servi à rien.

Avec l'arrivée dans le bourg le vent est moins présent. Rond-point 120 km. 2h06 pour le 2e tour, finalement je n'ai pas trop perdu.
Arrive le dernier tour.
Le vent est présent sur la grande ligne. De temps à autre je me mets en danseuse, aussi bien pour relancer que pour me dégourdir. Et là la moyenne va aussi en prendre un sacré coup.

Je le vois aussi au niveau du cardio. J'ai lâché la zone des 145/150 pour celle des 135/140.
Mais les jambes continuent de mouliner, c'est juste qu'elles le font avec une dent en plus sur le pignon de derrière. EN plus de ma tête que j'asperge régulièrement je vide mes fins de bouteille sur les pieds car ils commencent à être en feu.

Juste au moment où je redémarre après le ravito du 131 km, je me retrouve dans la roue d'un concurrent qui lui ne s'est pas arrêté et qui me double et devinez qui je trouve dans ma roue. Un Juge-arbitre à moto !!

Mais là, il n'est point question de réprimandes. Ils nous parlent et nous dit faire attention notre lucidité et que l'on peut, tout en respectant les 12m, alterner les coureurs, même s'il n'y a pas l'aspiration, il explique que cela permet de garder lucidité et motivation !!

Sur le coup j'ai eu un doute, mais après avoir vu tous les arbitres à l'arrivée, je pense qu'effectivement le gentleman sur la moto était aussi le fourbe de la tente de transition !!
Docteur Sifflet et Mister Cool !

Après le dernier demi-tour de la grande ligne droite. Il n'y a plus de vent et j'arrive à reprendre une position efficace sans douleur qui m'amènera une dernière fois au ravito perso. Entre temps j'aurais revu ma sœur juste avant le passage marteau-piqueur.
Au ravito je prends mon croque-marron, mais il devient plus dur de la manger. J'ai beau laissé fondre dans ma bouche, je m'y prendrais en 2 fois (ne 10 mn) pour arriver au bout. En général cela signifie que j'ai fini mon pain blanc, on ne va pas tarder à rentrer dans le dur.

J'ai un petit sursis lors de mon dernier demi-tour, car nous avons une légère averse. Elle rafraichit l'air et surtout casse le vent sur la dernière ligne droite. Celle-ci se fera sans trop puiser car déjà trop épuiser. Et comme le chante Soprano "Et je roule, roule, roule, roule, roule jusqu'au bout de la ligne !".

Le rond-point est en ligne de mire, désormais pas de tour du rond-point mais un petit tour à droite pour retourner sur l'ile aux enfants.

Un bénévole vient récupérer mon vélo. Au passage je récupère mon sac T2 sur le râtelier et vais sous la tente de transition. Cette fois-ci, je vais directement derrière le paravent. C'est ce qu'on appelle l'expérience.
Et à peine arriver sous la tente, l'orage qui grondait éclate, il déverse des seaux dos juste durant le temps où je suis sous la tente, pour une fois. Je me dis que c'est un bon présage cela va permettre de baisser la température.
Lieu de changement où je suis rapidement rejoint par deux autres personnes pas plus pressé que moi de repartir. On en profite pour échanger un peu sur nos sensations et sur ce que l'on pense faire sur la partie Running. Pour nous trois la marche sera de la partie mais jusqu'à quel point, telle est la question.
Entre temps une demoiselle nous rejoint, mais beaucoup plus aguerri que nous. Elle ne s'assoit pas. Enfile son poncho, se change et repart avant nous. Elle nous dit juste qu'elle espère passer sous les cinq heures.

Je la croiserais à 2 km de son arrivée en 4h38. Elle sera bien sous les 5h.
Je finis par partir après avoir bien sécher les pieds et badigeonner de NOK. Car "Pied mouillé, Ampoules à l'arrivée".

Le départ est peu laborieux mais je prends un rythme tranquille. Au moment où je franchis le pont pour partir sur mon marathon, le premier franchit le pont en sens inverse pour le terminer.

Pour une fois j'aurais démarré ma course à pied, avant que le premier n'ait terminé.

La veille avant de partir, mon ami Stéphane m'avait conseillé d'alterner 5mn course 1mn marche pour ne pas trop solliciter le mollet. J'ai donc prévu d'alterner course et marche. Par contre comme j'ai l'impression que ce va me prendre des heures, je me dis que je marcherais 1 mn à chaque ravito, il y en a 6 sur 10kms. Ça fonctionne jusqu'au 2e ravito mais je m'aperçois je suis à 8km/h et que ça va me faire trop courir.

Les nuages se sont dissipés et le soleil darde de tous ces rayons. Il est 15h passé et la chaleur s'intensifie. Je limite le goudron pour favoriser le sentier ou la terre et préserver un peu plus les articulations et réduire les chocs et les vibrations. J'ai déjà un échauffement, j'ai du oublié de la NOK. Je charge un bon coup et je n'aurais plus de soucis.

Je réduis donc à 1km (environ 7 à 8 mn) de course pour 1mn de marche. Ainsi j'arrive à boucler mon premier tour. Mais la fatigue commence à se faire sentir et la chaleur aidant je commence à craquer. J'augmente mes temps de marche et réduis mes temps de course. Je bois régulièrement alternant eau plate, eau ferrugineuse (ou gazeuse pour ceux qui ne seraient pas amateur de Bourvil). Pour l'alimentation j'essaye quelques chips mais sans succès alors j'en reviens au classique : bananes et quartier d'orange.

Ayant vu le premier et étant quasiment tout le temps en aller/retour, sauf durant la boucle sur l'île, je vais quasiment voir toutes les personnes qui me précèdent et parfois 2 ou trois fois.
C'est un ballet qui me fait un penser à un carrousel.

C'est notamment que je verrais 2 fois les 2 handisports. Et je croiserais à nouveau l'équipe d'espagne qui entoure le jeune handicapé dans son fauteuil rouge. Sur certaines parties du parcours nous avons droit à un arrosage au jet d'eau. Rafraîchissant mais trop bref.

Sur ma 2e boucle pratiquement aucune partie du parcours n'est à l'ombre. Et à partir de mon 15e kilomètre je sens que chaque fois que je cours, je puise. La jauge de carburant est éclairée depuis un moment et la réserve est vide, je tapote sur l'écran de la jauge, plus rien. J'ai promis de ne pas aller au bout de mes limites. Alors quand je commence à voir des étoiles à chaque fois que je cours, pourtant ce n'est pas encore l'heure du feu d'artifice. Je décide d'arrêter de courir. Cédric m'avait dit, tu te débrouilles, tu finis en marchant s'il le faut, mais tu termines. Donc Acte !
Ai-je pris le "Mur" des marathoniens ?

J'espère avoir pris assez d'avance avec le vélo pour ne pas risquer une arrivée hors délai. Et puis comme dit Sébastien Chaigneaux, tant qu'il n'y a pas de pépins physiques , il faut attendre mais le coup de moins bien finira par passer.

Alors je m'oblige à marcher sur 2 kilomètres. Je réduis beaucoup l'allure, le temps de visiter 2 ravitos. Après je décide de marcher un peu plus rapidement. Et oui, à Monistrol nous sommes aussi un club de marche nordique. J'augmente donc ma vitesse de marche. Je marche entre 5,5 et 6 km/h.
Au 19e kilomètre je double un autre marcheur complètement cuit. ll me dit « qu'est-ce que tu marches vite », sauf que lui il est à son dernier tour, et termine dans 3km, et je lui dis qu'il me reste encore 2 tours complets. Là, il compatie.

Avec les dossards nominatifs, J'entends mon prénom de nombreuses fois et c'est très sympa. Mais ca ne fait pas tout.

Jusqu'à la moitié du 2e tour, j'arrivais à rigoler et à répondre avec le public et les bénévoles, mais la fin est plus dure s'annonce dur. Aux ravitos, je me force à boire du soda (que je secoue pour enlever le gaz) pour refaire du sucre rapide. Je me force à manger un peu plus. Saucisson banane ...
Sur une ligne droite une spectatrice remonte la file des concurrents pour nous encourager. Elle donne un petit mot d'encouragement 30s à tous ceux qu'elle croise.
Elle arrive à ma hauteur, demande si ça va, m'encourage et ...
"Madame, il est interdit de rester avec les coureurs !" une arbitre toute jeune, zélée arrive en vélo par derrière.
Je me dis qu'il doit y avoir une caméra cachée. Belzebuth tu descends de mon épaule et tu me laisses tranquille !
Il y a des centaines de spectateurs qui suivent (plus ou moins directement) des coureurs et pourtant.

Durant la boucle où je démarre mon troisième tour je rencontre Lorenzo, un marcheur encore plus rapide, il est plutôt à 6,5. Mais comme il a un gros bagou je l'accroche, ça me passera le temps, mais je sais que ça ne durera pas car il est à son dernier tour et se réserve pour pouvoir corrir les 4 derniers kilomètres. Mais ce qui est pris n'est plus à prendre.

Et donc pendant une demi-heure, je me laisse porter par son flot de paroles. Il est membre d'un club de Biarritz, "Les Ours Blancs" où l'objectif n'est autre que nager l'hiver en maillot en mer. Il a donc l'habitude de nager à 11° en maillot. Et ce matin il a eu très chaud avec son combinaison. Pour lui un des principaux avantages de son association : il n'est jamais malade.
J'apprends aussi que le petit handicapé est suivi par une trentaine de personne qui se relaye. Pour la partie natation, il était sur un bateau et une nageuse émérite tractait le bateau !!

Quelques minutes plus tard on récupère un coureur qui se met à marcher à notre hauteur. Il est dans le même tour que Lorenzo. Il s'agit de Julien, ancien RugbyMan. Et en fait je le connais c'est celui avec qui j'ai fini le tri de St Rémy l'année dernière, à la même époque. Il me dite décidemment on est toujours dans les mêmes galères. Sauf que cette année il me reste 10 km de plus que lui.

On continue un bout de chemin ensemble et on se fait rejoindre par le groupe du petit handicapé. Il reste 6km à mes 2 comparses et ils décident de partir avec le groupe. Lorenzo l'avait promis. Pour moi il est encore trop tôt pour tenter de repartir je marche encore sur 3 kilomètres. Ca m'aura fait quasiment 2h30 de marche soutenues. Mais je sens que la hanche se plaint et encore 3h de marche (15km à 5 km/h) ça risque de ne pas tenir. Le problème est que recommencer à courir est un risque sur le mollet.
La chaleur est étouffante. Et bien que certains passages sont à l'ombre ils sont encore rare.

Après une longue ligne droite au soleil, arrive un peu d'ombre après un ravito, je décide de recourir quand je suis à l'ombre et marcher au soleil. C'est ainsi que je rattrape une autre concurrente "Carole" (même prénom qu'à Kalkar pour ceux qui ont suivi). Elle est encouragée par une de ces collègues de club. Celle-ci voit que je remarche quand elle arrive, alors me dit de la suivre.
Mais je lui dis qu'il me reste encore 15km, et ça tombe bien, elle aussi. Dons je me force à la suivre. Et en fait elle est très régulière 4mn de course, 1 mn de marche. Elle fait ça depuis le début. Et pour l'instant ça lui réussit.

Exactement la technique de mon ami Stéphane. Comme nous parcourons 6km. Mais dans le début de la dernière boucle Carole,  a épuisé sa jauge et ne peut plus relancer. Elle m'encourage pour que je garde le rythme alors je repars. Je vais pouvoir courir encore 4km. J'aurais l'occasion de la recroiser pour lui dire que sa technique tient toujours.

Mais le peu de ressources que j'avais, s'épuise à 4km de l'arrivée. Juste après une rencontre assez cocace. Je suis tout seul sur ma ligne droite, et un couple sort de chez lui. Le mari chemise ouverte, bermuda, son épouse en robe de chambres. Elle a les bras croisés et me regarde "Mais vous courrez encore à cette heure. - Je suis bien obligé si je veux arriver. - Alors là je suis admirative." Et cette dame avec toute la sincérité qu'elle avait dans la voix m'a fait un bien énorme.

Je n'insiste pas il faut que j'en garde juste assez pour courir sur le tapis de l'arrivée. Désormais je pense que c'est jouable. Ce n'est pas le moment de faire le fou. Une nouvelle déchirure à 3km ce serait.... une déchirure (c'est plus facile de faire le jeu de mots quand c'est terminé :-)).

Sur mon dernier tour et je salue tous les bénévoles, au bout de 4 tours forcément il y avait des liens.
Je salue donc l'avant dernier ravito à moins de 3km de l'arrivée et au même moment un coureur remonte (3e km de la boucle) et fait une blague sur le soda qui ressemble à du pastis. Et là, la bénévole qui veut l'encourager, lui dit, "ne vous inquiétez pas vous l'aurez dans moins de 8km votre pastis. - Ah non parce que moi il me reste encore un tour en plus."
Il lui reste plus de 18km et il n'est pas en marche rapide, il en aurait pour plus de 4h. Il ne terminera pas dans les temps. Ca jette un léger froid.

Je redescends ma ligne droite, durant laquelle, un concurrent de Velizy s'arrête à mes côtés pour discuter et marcher un peu. Il est à son 9e IRON, mais celui-ci est compliqué, car la semaine dernière il a fait les 24h de l'INSA. Epreuve de malade qui consiste en : 4h de natation en piscine / 14 de vélo / 6h de CAP.

Au bout de la ligne on croise un Juge qui demande si l'on est sur le dernier tour. Nous c'est bon, mais je lui explique le gars du pastis. Ils iront le chercher, pour le faire couper et rentrer sans faire les 4 tours.

Mr Velizy repartira à courir quelques minutes plus tard. J'attendrais d'avoir le petit pont qui mène à l'île aux enfants pour relancer la machine.
Je passe le petit pont. Et un bénévole avec qui on avait échanger sur la chaleur le tour précédent me reconnait et me lance "Vous voyez, finalement il ne fait pas si chaud que ça. - Oui mais vous auriez dû mettre la clim plus tôt je serais arrivé avant." Et c'est vrai qu'à 21h passé, la chaleur avait disparu.

Je fais le tour de l'île et j'emprunte enfin la flèche bleue "Arrivée". Le pont qui mène à l'île aux bananes est éclairées par des led. J'évite la zone sablonneuse en courant sur les côtés du chemin.
L'arche d'arrivée est en vue. Encore un pont pour arriver sur le port. Reste 150m. 50m (en ligne droite) virage à 90° (quand je vous dis qu'il n'avait pas de compas).
100m tout droit.

Ca y est. C'est terminé : 14h38

Je lève les bras (en fait je crois les lever super haut mais même pas).
Benji m'attend avec la médaille qu'il me remet autour du coup et me félicite et je lui dit "Elle s'appelle Désirée celle là".

Petite photo souvenir.

Je me ravitaille et pars faire la queue aux kinés. Avec la chaleur la queue a bien fondue, mais il reste les cas les plus compliqués.
Comme il y a encore un peu de monde, ma sœur prend mon dossard et part récupérer mon vélo et mes sacs de transition qui sont toujours chez Casimir.

Quand je passe sur la table, je tombe sur une vraie pipelette. Elle a fait 2 premières années de médecine, mais c'était un mal pour un bien. Elle termine sa première année de kiné. Globalement elle est aussi contente que ça se tire. Elle masse cuisse gauche, cuisse droite, elle parle, parle et soudain... grosse douleur sur la cuisse droite.
Elle vient de remonter avec le poing sur tout le côté, et elle m'avoue "Oui en fait je parle pour faire diversion car ça fait toujours mal." Elle fait encore deux ou trois remontées. "Mais vous voyez ça vous a pas fait mal à gauche. - Oui mais vous ne l'avez pas fait à gauche. - Ah, alors j'ai oublié, je vais rectifier."
Et ca fait mal aussi à gauche qu'à droite.
"Vous me remercierez demain." Et oui je la remercie.

Reste les mollets. RAS sur le gauche. Sur le droit, je sens qu'elle ralentit le mouvement. Elle cherche quelque chose avec son pouce.
Deux secondes plus tard, elle trouve, elle appuie et je me retiens de crier. A priori un petit début de contracture.
A priori l'élève a bien suivi les cours.


Je termine à temps pour voir le feu d'artifice.


L'aventure s'achève. Sur le moment je ne réalise pas. Mais je suis heureux d'être arrivé au bout.


Franchement, le Frenchman c'est possible !!


Comme m'a dit ma sœur Valérie : "Merci pour ce moment" (sauf qu'elle, elle était sincère :-) )!

Je remercie ma femme et mes enfants pour leur patience, aussi bien lors de mes entrainements que pour mes sauts d'humeur corrélés à mes pépins physiques.
Ma sœur pour l'assistance logistique et les encouragements tout au long de la course.
Mes parents pour leur inquiétude :-) !
Je remercie aussi tous ceux qui m'ont soutenu, encouragé. A Saint-Etienne, A Monistrol, Au Casino Running et Natation, A Espace et Course. Parfois un petit mot suffisait à remettre du baume au coeur. Je ne vais pas faire la liste car j'aurais trop peur d'oublier quelqu'un.
Merci à tous les messages d'avant et d'après course, par SMS ou Strava.

Merci aussi à ceux qui sont arrivé au bout du récit, sans doute le plus long que j'ai fait et que je ferais.


A bientôt pour le prochain récit.


Merci

Jérôme



PS : seule ombre au tableau, les ravito perso vélo ont tous été poubellisé par l'employé qui a fait le ménage. Il a tout embarqué avec les vrais poubelles. Quel con !!
Adieu Bidon, Chambre à Air, Crème solaire ...





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Bilan : 1h33 / 6h27 / 6h10

Je vous fais grâce de transitions.


Natation la plus rapide :               Le 232e scratch 53'51" mn (oui lui il n'est bon qu'en Natation :-) )!
Vélo le plus rapide :                       Le 2e scratch     4h30 ==> 40 km/h
Marathon le plus rapide :            Le 3e scratch     2h57 !!

Le 1er scratch est 5e en natation (54'53"), 2e en vélo (4h32) et 3e en CAP (3h04), mais c'est le plus complet : 8h37


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